dimanche 15 mai 2011

Mathematics : Salyu x Salyu



Démultiplication des sources à tous les étages, millefeuilles de voix suspendues et reproduites à l’infini, production pleine de petites attentions discrètes et scintillantes : Salyu se fractionne subtilement à travers Soundbeam, se dédouble pour donner naissance à un projet futuriste pop mirifique – dont le père n’est autre que Keigo Oyamada, aka Cornelius – remplit de petites merveilles synthétiques, joyaux technologiques d’electronica-pop aux allures plutôt classe et renvoyant pas mal de clones ennuyeux tournant en rond dans leur niche. Soundbeam est donc issu de l’union de deux célébrités nipponnes, toutes deux révérées dans leur pays, et peut être différemment sophistiquées pour bénéficier d’un véritable rayonnement sur le territoire latin.

Suivant les traces de Sensuous, dernier album en date du petit génie Oyamada, ce nouveau duo se complète à merveille sur une petite dizaine de titres circonscris par le talent de techniciste et la vision singulière de Cornelius - qui produit le projet. A l’écoute de sa discographie on constate très rapidement la continuité du programme-manifeste formel à nouveau appliqué dans Soundbeam. Rien de particulièrement neuf pourtant à découvrir entre les lignes, mais la poursuite d’une upgrade à long terme de la pop (comme l’annonçait déjà Sensuous), gravissant avec élégance ses multiples extrémités et excroissances. Cornelius offre donc un terrain de choix à la chanteuse Salyu, lui offrant la possibilité d’explorer de nouveaux horizons vocaux. Même si celle-ci continue de profiter d’un encadrement globalisant – sur cet album Oyamada fabrique les mélodies, Shintaro Sakamoto frontman des Yura Yura Teikoku et Seiko Ito s’occupent des textes – le résultat est vraiment réjouissant et suggère de belles perspectives sonores.




Salyu se clone avec splendeur sur Tada no Tomodachi – le clip fragmenté en quatre écrans réalisé pour l’occasion – les voix se superposent, contretemps à foison – on peut d’ailleurs regarder le clip en lançant les vidéos quand on le veut : ludique et hypnotique. L’album oscille au final assez naturellement entre hymnes techno-pop (Dorei, titre phare de l’album qui se permet de reprendre tout ce qui faisait nous dire que Cornelius c’était un peu la pop du futur : gros kick compressé, cloches à répétition, bleeps de partout, le tout surplombé par la mélodie vocale géniale de Salyu ; aussi Mirror Neurotic qui pourrait tendre vers Takako Minekawa), et expérimentations un peu naïves comme sur Utaimasho. D’autres comme Sailing Days rappellent la magie nocturne qu’exerçait des titres comme Tone Twilight Zone, Sensuous ou encore l’incroyable Omstart.

On se dit que Cornelius est définitivement un des plus habiles et des plus malins artisans du son à l’heure actuelle ; on se dit aussi, malgré que l’album n’apporte pas forcément quelque chose de sincèrement inédit (et on s’en fiche un peu sur ce coup-ci), que sa collaboration avec la chanteuse J-pop Salyu n’est pas vaine, au contraire, oriente doucement la pop dans une direction pleines de subtilités et de sensibilité, ne pouvant que faire du bien dans le marasme postmoderne.

Salyu x Salyu - Dorei